Préparation à base de plantes, les différents solvants d’extraction

Je reçois beaucoup de questions ce matin, alors voici donc quelques clarifications importantes sur la préparation de produits à base de plantes dont on utilise ce que l’on appelle des “solvants”, à savoir l’alcool, l’eau, le vinaigre, et l’huile.

Qu’est-ce qu’une extraction ?

Une extraction consiste à utiliser un solvant (eau, alcool, glycérine, vinaigre, huile) dans lequel on va immerger une plante pour tenter d’en extraire des molécules (responsables des principes actifs) qui vont se dissoudre dans ce solvant.

Ce procédé va engendrer ce que l’on appelle des “liaisons chimiques”.

Les liaisons chimiques entre atomes ne sont pas des liaisons solides; ce sont des liaisons électrostatiques. Pour se lier entre eux, les atomes vont déplacer leurs électrons et ils vont se les partager.

Quand deux atomes vont attirer le même électron, ils vont se rapprocher et se « lier ». La capacité d’un atome à attirer un électron est appelée l’électronégativité.

Tous les atomes recherchent la stabilité. C’est ce qui va les forcer à faire des liaisons avec d’autres atomes.

Il y a deux types de liaisons: la liaison covalente, que l’on peut qualifier de « partage » d’électrons entre atomes, et la liaison ionique, qui est comparable à un « don » d’électrons. Je ne vais pas aborder ici les liaisons ioniques, car le sujet est déjà bien assez complexe, mais nous allons mettre le focus sur les liaisons covalentes afin d’aborder les notions de polarités.

Il y a donc plusieurs éléments dont il faut tenir compte lorsque l’on veut choisir un solvant pour y faire macérer une plante, à commencer par la polarité de notre solvant et des molécules de nos plantes.

Je vous ai déjà expliqué que l’huile est un solvant totalement non polaire. L’huile est en effet composé de grosses molécules de triglycérides avec seulement quelques atomes d’oxygène “coincées” au milieu de plusieurs atomes de carbone. Ainsi l’oxygène, qui est très électronégatif, donc très instable et qui a facilement envie de se lier, ne peut pas se lier à d’autres molécules car il est pris entre de nombreux atomes de carbone qui eux sont très stables et ne vont pas chercher à faire de nouvelles liaisons. Ainsi, il n’y a pas débalancement de charge, et donc pas de nouvelles liaisons entre molécules, ce qui fait que l’huile n’est pas un très bon solvant car ses molécules ne vont pas chercher à se lier aux molécules de nos plantes facilement. C’est pour cela qu’il est nécessaire de chauffer légèrement la préparation, et de mélanger régulièrement, ceci afin d’augmenter la possibilité de rencontres et d’échanges entre les molécules.

Ainsi on peut répondre à la question : qu’est-ce qu’une molécule non polaire ?

Une molécule non polaire est une molécule dont les électrons sont distribués de façon égale, équitable, et qui n’engendre pas de déplacement de charges électrique « résiduelle ».

Mais qu’en est-il des molécules polaire, comme l’H2O, la molécule d’eau ?

Nous observons d’abord que la molécule d’eau est une toute petite molécule, contrairement à l’huile, composé d’un atome d’oxygène et de deux atomes d’hydrogène, et elle va pouvoir s’infiltrer partout et attirer à elle différentes autres molécules. Cette petite molécule est très instable car sa charge électromagnétique est fortement debalancée, elle va donc attirer fortement à elle toutes sortes de molécules polaires qui vont également chercher à se compléter et ainsi chercher à stabiliser leur charge électromagnétique.

L’eau est ainsi ce que l’on appelle un solvant polaire.

Par cette exemple, nous pouvons donc répondre à la question : qu’est-ce qu’une molécule polaire ?

Une molécule polaire est une molécule dont les électrons sont distribués de façon inégale, créant ainsi un débalancement de la charge électrique dans une direction. Cette force exerce une attraction un peu comme un aimant.

Nous avons abordés l’huile, et l’eau. En chimie une valeur arbitraire leur a été attribuée, nous plaçons la polarité de l’eau à 1, et celle de l’huile à 0.

L’éthanol et l’acide acétique on un degré de polarité similaire, situé entre les deux : 0,64.

Ces valeurs sont totalement arbitraires et nous permettent juste d’avoir une base sur laquelle comprendre les différentes notions de polarité.

On voit que pour l’éthanol et l’acide acétique pur, ces solvants se situent à un degré de polarité qui va permettre d’extraire à la fois des molécules polaires et non polaires.

Mais qui utilise de l’acide acétique pur ? Personne ! Nous utilisons du vinaigre avec en général 5 à 8% d’acide acétique, le reste étant de l’eau. La polarité d’un vinaigre de pomme par exemple va donc fortement être modifié, et se rapprochera de la polarité de l’eau, avec une toute petite tendance à extraire quelques molécules non polaire, comme certaines huiles essentielles par exemple. Pae contre, l’acide acétique contenu dans un vinaigre va très bien réagir avec les bases, autrement dit les minéraux, c’est pour cela que l’on dit que le vinaigre extrait bien les minéraux de nos plantes reminéralisantes comme l’ortie. La présence d’azote dans le vinaigre lui procure également une affiné spécifique avec certains alcaloïdes, c’est encore une fois l’une des raisons pour laquelle le vinaigre est utilisé avec certaines plantes dont on veut extraire les alcaloïdes comme l’allantoïne de la consoude, qui n’est par ailleurs pas du tout bien extraite dans l’huile et très peu dans l’alcool. Je ne vais pas revenir sur ce point car je vous ai déjà partagé un article en détails sur le sujet, mais vous comprenez pourquoi il faut être prudent avec les effets de mode comme le baume de consoude, car l’huile et l’alcool pur ne sont pas du tout des bons solvants si l’on cherche les propriétés cicatrisantes de la consoude.

Concernant l’alcool, ici aussi, en herboristerie nous utiliserons parfois de l’alcool “pur” (à 96%) pour des plantes fraîches, parfois de l’alcool de fruits autour de 45° pour des plantes sèches, et le degré d’alcool va très fortement influencer les molécules qui vont être extraites puisque la polarité va être modifiée par la présence d’eau.

Un alcool à 45% sera beaucoup plus polaire qu’un alcool à 96%.

Il faut aussi savoir que l’alcool PUR est hygroscopique, comme la glycérine et le miel. Qu’est-ce que cela veut dire ? et bien cela veut dire que ces solvants vont attirer fortement l’eau, c’est la raison pour laquelle il est préférable d’utiliser des plantes fraîches, contenant de l’eau, car il va y avoir une force d’attraction intéressante qui va plus facilement briser les parois cellulaires des plantes.

Ce qui est tou l’inverse de l’eau en tant que solvant, qui va plus facilement extraire les molécules des plantes qui sont déjà séchées.

Donc l’alcool et le vinaigre ne sont pas de solvants polaires, ni non polaires, il est impossible de les catégoriser de la sorte. En phytochimie, on parle de TENDANCE polaire ou non polaire, car cela va dépendre d’un très grand nombre de paramètres.

Et je pense que vous l’aurez compris, il est impossible de tout résumer et de tout apprendre en quelques jours. Cela demande des études approfondies des plantes au cas par cas, car les plantes sont constituées d’une multitude de molécules qui vont réagir ensembles et de différentes manières.

Néanmoins vous pouvez déjà retenir ces quelques informations et vous questionnez sur les différents principes actifs que vous cherchez à extraire et quels sont les solvants les plus appropriés.

C’est sur ce genre de détails que j’aime entre autres revenir avec minutie et profondeur durant mes transmissions, car chaque plante est unique et mérite d’être valorisée de la meilleure façon qu’il soit. C’est aussi primordial pour réaliser des remèdes efficaces et comprendre en profondeur comment les plantes vont agir dans notre corps en fonction de la préparation que nous aurons choisi.

En espérant que cela vous ait apporté quelques nouveaux éclaircissements sur la manière de choisir ses solvants pour réaliser des produits à base de plantes!

Si ces informations vous semblent pertinentes et utiles, n’hésitez pas a partager autour de vous. Je reçois souvent de nombreuses questions, et je pense que ces notions de phytochimie méritent d’être vulgarisées et accessibles !

Jess

Herboriste et poétesse

www.jardinalchimique.com

www.herboristeriesensible.com

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